Caractéristiques
- réalisateur : Mong-Hong Chung
- année de production : 2008
- date de sortie : 26 août 2009
- durée : 106 minutes
- pays : Taïwan
- N° de visa : 123 758
- festivals : Festival de Cannes un certain regard 2008
Synopsis
C’est le jour de la fête des mères à Taipei. Chen Mo a pris rendez-vous avec sa femme pour un dîner, dans l’espoir de renouer leurs liens distendus. Mais, il trouve sa voiture bloquée par une autre garée en double file après l’achat d’un gâteau. Toute la nuit, Chen Mo passe des heures à tous les étages d’un immeuble à la recherche du propriétaire de la voiture. C’est ainsi qu’il rencontre des personnages excentriques : un vieux couple vivant élevant leur petite-fille surdouée après la mort de leur fils unique, un patron de salon de coiffure manchot qui adore faire et manger de la soupe de poisson, une prostituée venant de Chine continentale qui veut échapper à son maquereau, ainsi qu’un tailleur Hong-kongais accablé de dettes qui s’est fait coincer par des voyous. Après avoir vécu et surmonté de nombreux événements au cours de cette nuit, Chen Mo peut enfin sortir sa voiture, emmenant avec lui ces nouveaux amis de rencontre.
Revue de presse
Le Monde
L’incroyable histoire de Chen Mo procède d’une grande injustice. Alors qu’il a déjà garé sa voiture en stationnement interdit, près de l’une des meilleures pâtisseries de Taïpeh, il redémarre parce qu’une place autorisée vient de se libérer. On est à la mi-journée, il lui faudra attendre l’aube pour remonter dans sa voiture, après des tribulations insensées.
Premier film de Chung Mong-Hong, Parking ressemble à première vue à une version taïwanaise d’After Hours (1985) de Martin Scorsese, le récit d’une nuit où tout va de travers. De fait, le chemin de Chen Mo croise celui de gens très dangereux, parmi lesquels un proxénète qui vit dans un appartement baigné d’une lumière rouge qui pourrait faire un duplex avec un autre bordel, vu dans A tombeau ouvert (1999) de Scorsese. Mais Parking n’est pas méchant pour deux sous, c’est l’un des charmes, et l’une des limites, du film. En se garant sur cette place maudite,
Cheng Mo a passé la frontière qui le séparait de la vie des autres. Sa nuit est faite de violence et de crime, mais aussi de mélodrame à l’ancienne. La première porte à laquelle il frappe pour trouver le propriétaire de la voiture qui l’empêche de partir s’ouvre sur un couple de vieillards qui le prennent pour leur fils disparu depuis des années. Il rencontre aussi une prostituée venue de Chine continentale, un tailleur
pour hommes qui se débat face à des créanciers féroces. A ces horreurs quotidiennes, Chen Mo oppose d’abord sa bonne conscience de petit-bourgeois (il est graphiste, sa femme est mannequin) pour ensuite trouver le chemin d’une rédemption un peu convenue. Heureusement, le metteur en scène use abondamment, mais à bon escient, d’un humour absurde et burlesque qui relève cette tendance un peu larmoyante.
Chung Mong-Hong a une manière très particulière de filmer la violence physique : il arrive que dans le même plan on se croie chez Tarantino, à son plus sadique, pour s’apercevoir, l’instant d’après, qu’en fait tout cela n’est guère plus grave qu’une bataille de tartes à la crème entre Laurel et Hardy.
S’ajoutent au menu quelques gags culinaires bienvenus impliquant tour à tour une tête de poisson et des gâteaux à la mousse au chocolat. Cette combinaison de saveurs – amère, sirupeuse, astringente – fait de Parking un film aussi déconcertant que plaisant.
Thomas Sotinel
Télérama
A vous dégoûter définitivement de l’automobile : après une journée de travail, Chen Mo voudrait bien retrouver sa femme. Pas de chance, sa voiture est bloquée par une autre, garée en double file. Le jeune homme part à la recherche du conducteur indélicat dans la nuit de Taipei – superbement filmée (le réalisateur signe lui-même la photo angoissante du film). C’est le début d’une longue série de rencontres insolites… et d’emmerdements croissants.
Comme dans After hours, de Scorsese, tous les éléments – matériels, humains, sinon divins – semblent se liguer contre le héros. L’argument tragi-comique fonctionne constamment dans ce récit qui alterne surplaces et surprises. Les personnages excentriques que croise le malheureux Chen Mo (un tailleur maladroit, un coiffeur manchot, un maquereau pénible, les vieux parents d’un condamné à mort…) permettent de passer du burlesque à l’émotion. Ruptures de ton qui trouvent en Chen Chang un interprète capable d’exprimer abattement, colère ou tendresse avec la même persuasion, grâce à un jeu sans effets. On aimerait en dire autant de la mise en scène. Hélas, le réalisateur, dont c’est le premier long métrage de fiction après une centaine de pubs, semble constamment hésiter sur la forme à adopter. Caméra épileptique ou fixe ? Regard frontal ou angles bizarroïdes ? Il ne choisit pas, quitte à tout mélanger dans la même séquence. Sans avoir conscience que, dans son film, les moments les plus réussis sont les plus sobres.
Samuel Douhaire
Studio / Cinélive
Un film choral virtuose aux allures d’un After Hours asiatique sans temps mort.
Il y a en circulation plus de 2 millions de véhicules à Taipei pour seulement un demi-million de places de stationnement… Rassurez-vous : vous n’avez pas besoin de connaître sur le bout des doigts l’état de la voirie de la capitale de Taïwan pour savourer ce premier long métrage. Mais c’est bel et bien la difficulté de trouver un emplacement pour sa voiture qui est au centre de ce film choral virtuose aux allures d’After Hours asiatique. Son personnage central (le charismatique Chang Chen, découvert dans Happy Together de Wong Kar-wai) s’attendait en effet à passer une nuit tranquille avec sa femme dans l’espoir de renouer des liens en partie défaits lorsque, laissant son auto en double file pour l’achat d’un gâteau, il se retrouve coincé et lancé dans une expédition au coeur d’un immeuble pour retrouver celui qui le bloque. Conduit sans baisse de rythme, Parking est l’histoire de ses rencontres, toutes plus singulières les unes que les autres. Et sa réussite réside dans la précision de sa mise en scène et la fluidité de son récit prenant, qui évoque avec subtilité la difficulté d’établir des relations humaines dans un environnement urbain, propice à la solitude. Ce premier film maîtrisé symbolise le parcours de son réalisateur (qui en a aussi signé la belle lumière), venu à la fois de la pub et du documentaire. Un équilibre parfait.
Thierry Chèze
TélécinéObs
Un grave problème de voirie à Taipei – 500 000 places pour 1,8 million de véhicules – impose des stationnements interdits. A partir de cette situation digne de Ionesco, Mong-Hong Chung compose un théâtre de l’absurde à la taïwanaise. Un type ne peut pas rentrer chez lui parce que sa voiture ne cesse d`être bloquée par des importuns garés en double file. Tracas nocturnes peuplés de mafieux, de prostituées et de femmes au bord de la crise de nerfs, qui évoquent les cascades de mésaventures des héros d`«After Hours», de Martin Scorsese. Mais Mong-Hong Chung, cinéaste prometteur, a un style visuel bien à lui et un humour acide. On peut donc aller voir «Parking» à pied.
L’Express
De l’influence de la circulation sur le comportement des Taïwanais. Parti acheter un gâteau au chocolat, Chen Mo retrouve sa voiture bloquée par un autre véhicule garé en double file. Alors qu’il en cherche le propriétaire, il va tomber sur un barbier amateur de poissons, une femme, aveugle, qui le prend pour son fils, une prostituée essayant de fuir son maquereau et un tailleur endetté.
Une chronique, donc, mais qui, justement, séduit par son ambiance étrange et réaliste, mélange d’émotion, de brutalité, de sourire et de poésie. Réalisateur de pub, Chung Mong-Hong, dont c’est le premier film cinématographique, peut être heureux d’avoir enfin du temps pour s’exprimer, laisser tourner sa caméra et réussit à accrocher l’attention.
Prometteur.
Eric Libiot
DVDRAMA
Parking est un premier film plutôt malin qui, en ayant l’air de ne pas y toucher, dit beaucoup avec peu. Sa force réside dans le scénario, construit sur un système de hasards et de conséquences, où Chen Mo doit vivre des aventures insolites avant de se réconcilier avec sa femme. L’action se déroule le jour de la fête des mères et ce n’est pas anodin : si le couple se déchire, c’est à cause de sa stérilité à elle et de son égoïsme à lui. Tous les personnages secondaires que l’homme croise peuvent être vus comme des extensions de son inconscient. A un moment donné, il va même jusqu’à prendre la place d’un fils disparu. Chacune de ses rencontres débouche sur une vérité : il y a plus malheureux que lui. Le parking du titre devient une métaphore de la misère humaine et répond à une déshumanisation inhérente à toute société urbaine. Le sujet n’est pas nouveau mais contemporain, toujours efficace s’il est bien développé. Avec cette base, on peut partir dans toutes les directions possibles, à condition d’être rigoureux : il faut garder un ancrage dans le réel et finir là où l’histoire a commencé. C’est le cas ici… Parking charrie autant le thriller, la comédie que le mélodrame et propose une réflexion sur le décalage provoqué par le point de vue : comment des événements tragiques peuvent devenir drôles à force d’accumulation ? Les changements de ton, qui peuvent dérouter, nourrissent cet exercice de style qui ne manque pas d’incarnation. S’il continue sur cette voie, en dosant aussi habilement les émotions et en n’ayant pas peur de montrer qu’il a du style, le taïwanais Chung Mong-Hong ira loin.
Romain Le Vern
Evene.fr
Sa voiture bloquée par un véhicule stationné en double file, le pauvre Chen Mo se retrouve contraint de frapper à de multiples portes pour en trouver le propriétaire. Ainsi débute l’histoire rocambolesque de ‘Parking’, où le jeune homme devient malgré lui le héros ordinaire d’une étrange épopée nocturne. Prétexte à un enchevêtrement de rencontres cocasses ou cauchemardesques, le parking constitue alors la métaphore de l’existence soumise à la fatalité et à l’absurdité du monde. Chung Mong-Hong, dont il s’agit ici du premier long métrage, alterne les
ambiances et les pistes narratives autour des tribulations surréalistes de son personnage principal dans la ville de Taipei, glauque et mélancolique. Si de rares flashbacks perturbent la cohérence de l’ensemble, le scénario – bâti sur les unités de lieu, de temps et d’action – détermine le cadre tragique des événements. Les destins d’une prostituée, d’un tailleur, d’un coiffeur ou encore d’une pâtissière s’y
croisent et s’entrecroisent de manière inattendue, insolite et inquiétante. Portrait social déroutant au sein de l’environnement urbain taïwanais, le film concilie avec habileté le fond et la forme, probablement grâce aux multiples casquettes endossées par son réalisateur – par ailleurs scénariste, monteur et directeur de la
photographie. Chung Mong-Hong se nourrit autant de l’esthétique de Wong Kar-Wai que d’une atmosphère kafkaïenne et d’un humour grinçant à la ‘Delicatessen’. Le propos, certes parfois alambiqué, ne fait que révéler l’ambition salutaire du film : ‘Parking’ vise une forme de cinéma total, où chaque aspect de la réalisation sert un propos diablement original, confirmant le talent prometteur du cinéaste.
Nicolas Baisez
Première
L’idée, habile, permet de revisiter une grande variété de registres : comédie noire, mélodrame conjugal, documentaire social, sans oublier le film de gangsters. Mong-Hong Chung, dont c’est le premier long métrage, s’acquitte de l’exercice avec assurance, tout en affirmant son statut d’auteur complet : il est à la fois scénariste, metteur en scène et directeur de la photo, un domaine dans lequel il excelle. À l’évidence, il lui manque un peu d’expérience pour se débarrasser de quelques influences encore voyantes (celle de Wong Kar-Wai, notamment), mais Parking est la meilleure chose qui soit arrivée depuis longtemps au cinéma taïwanais, qui n’est plus véritablement représenté que par Hou Hsiao-Hsien et Tsai Ming-Liang. Il était temps d’assurer la relève.
Gérad Delorme